A L'OCCASION DU RENOUVELLEMENT D'UN BAIL COMMERCIAL, LE BAILLEUR A-T-IL LA POSSIBILITÉ D'AUGMENTER LE LOYER ?


Auteur : Maître Valérie TERRAL-PRIOTON , avocat et consultant UNPI 31-09 .


La valeur locative

L’article L 145-33 du Code de commerce pose le principe selon lequel le loyer du bail renouvelé doit correspondre à la valeur locative, qui à défaut d’accord des parties est déterminée en considération des cinq éléments suivants :


Les caractéristiques du local considéré , c’est-à-dire essentiellement de ses dimensions, ses possibilités d’accès et d’utilisation, de son état d’entretien, de ses équipements, et de la présence éventuelle de locaux accessoires ou de dépendances.


La destination des lieux , c’est-à-dire les activités qu’il est possible d’exercer dans le local.


Les obligations respectives des parties en prenant en compte, comme précisé à l’article R 145-8 du Code de commerce, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie, ou les obligations imposées au locataire au-delà-de celles qui découlent de la loi ou des usages et qui constituent des facteurs de diminution de la valeur locative.


Les facteurs locaux de commercialité , qui dépendent principalement de l’intérêt que présente, pour le commerce considéré, l’importance de la ville, du quartier ou de la rue dans laquelle il est situé, des moyens de transport, de l’attrait particulier que peut présenter l’emplacement pour l’activité considérée et des modifications subies par ces éléments au cours du bail expiré.


5 ° Les prix couramment pratiqués dans le voisinage pour des locaux équivalents.


Le plafonnement du loyer


Par exception au principe de la fixation du loyer du bail renouvelé à la valeur locative, l’article L 145-34 du code de commerce instaure un plafond.


Ainsi, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler (si sa durée n’est pas supérieure à 12 ans car dans ce cas la règle du plafonnement est écartée de droit), ne peut excéder la variation, depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) ou des activités tertiaires (ILAT).


Ce mécanisme du plafonnement du loyer du bail renouvelé, instauré par l’article susvisé, est un buttoir qui empêche le bailleur d’obtenir un loyer égal à la valeur locative, à la différence du locataire qui a toujours la possibilité d’exiger que le loyer du bail renouvelé soit fixé à la valeur locative si cette dernière s’avère inférieure au loyer plafonné ...


Il peut toutefois être écarté s’il est démontré que les éléments visés aux 1 ° à 4° de l’article L 145-33 du Code de commerce (caractéristiques du local considéré, destination des lieux, obligations respectives des parties, et facteurs locaux de commercialité, à l’exclusion des prix couramment pratiqués dans le voisinage) ont subi au cours du bail expiré une « modification notable ».


Il découle des articles R 145-2 à R 145-11 du code de commerce que la modification notable de l’un des éléments susvisés peut résulter :


- d’une modification matérielle des lieux loués ;

- d’une modification des clauses du bail;

- d’une modification de la destination des lieux loués;

- des circonstances ayant entouré la fixation du loyer du bail à renouveler;

- de la modification des facteurs locaux de commercialité.


Le cas d’espèce


Un arrêt récent de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 13 octobre 2021, n° 20-12.901) donne un exemple de ce qui peut, ou ne pas, être considéré comme une modification notable ouvrant droit au déplafonnement du loyer.


Dans ce cas d’espèce, le propriétaire d’un local commercial à destination de restaurant, brasserie, bar, avait demandé à l’occasion du renouvellement du bail, que le nouveau loyer soit déplafonné et fixé selon la valeur locative, au motif que le preneur avait, au cours du bail expiré et au bénéfice d’une autorisation d’occupation du domaine public qui lui avait été accordée, agrandi la terrasse extérieure de son établissement.


Le bailleur soutenait que cet agrandissement constituait une modification notable des conditions d’exploitation du local, visée par l’article R 145-3 du code de commerce, justifiant le déplafonnement du loyer.


La Cour d’Appel de Besançon (11/09/2019 n° 18/00219), rejette cette demande en retenant que l’extension, au cours du bail expiré, de la terrasse en plein air installée devant la brasserie, sur le domaine public et en vertu d’une autorisation administrative, ne pouvait être retenue comme constituant une modification des caractéristiques des locaux loués dès lors qu’elle ne faisait pas partie de ceux-ci.


La Cour de cassation valide cette analyse.


Par contre, elle censure l’arrêt au visa des articles L 145-33, L 145-34 et R 145-6 du Code de commerce en estimant que la Cour d’appel aurait dû rechercher si l’autorisation municipale, qui avait permis d’étendre l’exploitation d’une terrasse sur le domaine public, avait modifié les facteurs locaux de commercialité, ce qui dans ce cas, pouvait constituer un motif pour pouvoir déplafonner le loyer.


En effet, l’agrandissement d’une terrasse peut présenter un intérêt pour le commerce considéré, même si elle ne fait pas partie des locaux donnés à bail. Si cette extension ne peut être assimilée à une modification des caractéristiques du local, en revanche, elle peut entrainer une modification des facteurs locaux de commercialité (Articles L 145-33 4° et R 145-6 du Code de commerce) dès lors qu’il est démontré qu’elle est notable et qu’elle a eu une incidence favorable sur le commerce considéré.

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